Banquiers Privés depuis près de 200 ans

Interview réalisée par Leila Vassiltchikov-Ali Khan

Interview réalisée par Leila Vassiltchikov-Ali Khan

Head of Legal & Tax
Attorney-at-law
Trust and Estate Practitioner (TEP)

Fondée à Genève en 1844 sous forme de société en commandite, la banque Bordier est une entreprise familiale avec, à sa tête et en son sein, plusieurs membres de la famille.
Bordier & Cie, qui compte aujourd’hui 270 employés, est une banque privée indépendante dédiée aux clients privés et à leurs familles, détenue et dirigée par la 5e génération de ses fondateurs.

Bordier, une entreprise familiale dirigée par la 5e génération

La banque Bordier est une entreprise familiale. Mais est-elle perçue comme telle par ses clients ?

Grégoire Bordier (GB) : J’en suis persuadé. D’autant plus persuadé que selon moi, l’objet «entreprise familiale» dépasse largement le cadre qui le définit. En effet, au-delà de la détention de la structure par une famille seule ou majoritaire, de la transmission de génération en génération ou encore de la présence de la famille dans le top management, ce qui caractérise ce type d’entreprises est compris de manière beaucoup plus large par les clients. Pour moi, ce qui donne un caractère familial à une entreprise, c’est avant tout son état d’esprit, son ADN et les valeurs qu’elle défend. Il se dégage aussi des sociétés en mains familiales une sensation de stabilité et de proximité. Cela étant, il est vrai que plus il y a de membres d’une famille qui sont détenteurs économiques, plus l’esprit de famille et l’impact de celle-ci sur l’entreprise sera dilué et plus les relations tendront à se complexifier.

Parlez-nous de votre statut. Quelle est la spécificité de la banque Bordier ?

GB : Bordier n’est pas une entreprise familiale comme les autres. Sa structure revêt la forme d’un partenariat. Juridiquement parlant, cela veut dire que nous sommes une société en commandite par actions, dont les parts sont, dans notre cas, détenues à leur tour par une société en commandite simple. Une rareté en Suisse. Dans notre pays, nous ne sommes plus qu’un petit groupe de banquiers privés à être dotés d’un tel statut. À part Bordier & Cie, les banques Baumann & Cie, E. Gutzwiller & Cie, Rahn+Bodmer Co et Reichmuth & Co en font partie. Dans les faits, cela signifie que les associés de ces banques endossent une responsabilité illimitée et, par conséquent, qu’ils sont engagés et impliqués dans toutes les actions menées par leur établissement. Pour moi, c’est un avantage concurrentiel important. Chaque client a ainsi l’assurance que ses avoirs seront gérés avec le même soin que les nôtres. Nos intérêts mutuels sont donc parfaitement alignés. Ce qui est plus difficile à faire lorsque les intérêts des actionnaires passent avant ou sont différents de ceux des clients.

“Pour moi, ce qui donne un caractère familial à une entreprise, c’est avant tout son état d’esprit, son ADN et les valeurs qu’elle défend.”

En quoi l’étiquette « entreprise familiale » vous permet-elle de vous distinguer dans un environnement aussi compétitif que celui de la gestion de fortune ?

GB : Pour les personnes qui n’apprécient pas trop le changement et recherchent la stabilité et la prévisibilité, travailler avec une banque en mains familiales apporte clairement un surplus de sécurité, notamment en raison de la notion de responsabilité ; ce à quoi on peut ajouter la proximité : proximité entre la direction et les employés, entre les collaboratrices et les collaborateurs, entre les gérants de fortune, la famille et les clients. Il s’agit d’un élément que les gens apprécient tout particulièrement chez nous. Cette proximité nous permet de bénéficier de souplesse et de réactivité, dans la prise de décision notamment. Je pense également que lorsque l’on « achète » familial, on sent une proximité avec l’ADN de la société. S’y retrouve, en outre, un mélange de stabilité, de longévité et de vision à long terme qui rassure et fait toute la différence. Dans ce cadre, ce qui vaut pour les clients vaut aussi pour nos collaboratrices et collaborateurs. Notre stratégie à long terme permet à toutes celles et ceux qui participent à notre succès de ne pas avoir l’esprit encombré par des préoccupations telles qu’une éventuelle transformation structurelle, comme un rachat, un changement brutal au sein de la direction ou encore l’arrivée d’un nouveau propriétaire qui viendrait imposer de nouvelles règles et bouleverser la culture d’entreprise. Ce sont là des lignes de force que l’on peut identifier dans des sociétés qui nous ressemblent, et ce, peu importe leur taille. Je pense ici à des marques familiales comme Firmenich, Bongénie ou Manor.

Quelles sont les valeurs que la famille souhaite voir incarnées par l’entreprise ?

GB : Pour ma part, il n’y a pas de distinction à faire entre les valeurs portées par la famille et celles de l’entreprise. Elles forment un seul et même socle et sous-tendent toute notre activité. Parmi celles-ci figurent en premier lieu les notions de responsabilité, d’indépendance, mais aussi de durabilité et de disponibilité. Il y a également des principes qui nous sont chers et que nous appliquons chaque jour dans notre métier de banquier, à tous les échelons de l’entreprise. Je veux parler de l’éthique, du professionnalisme, de la sécurité et du sens du service. Des principes fortement ancrés dans nos Grégoire Bordier pratiques quotidiennes.

Grégoire Bordier, Associé

Comment avez-vous intégré l’entreprise familiale ?

GB : Naître dans une famille dépositaire d’une entreprise familiale n’a rien d’anodin. À l’heure dite, se pose immanquablement pour la jeune génération la question de l’intégration dans l’entreprise et pour les aînés, celle de la transmission. Mais personne n’est forcé de se lancer dans le bain de la finance. C’est une affaire de choix. Aujourd’hui, nous sommes plusieurs à travailler au sein de l’entreprise: mon frère Evrard, Associé comme moi, ma cousine, Camille Bordier, en tant qu’assistante de gestion, et moi-même. Pour ma part, la finance m’a attiré très tôt, mais j’ai d’abord souhaité faire mes armes en dehors de la maison familiale pour éprouver mes capacités et accumuler de l’expérience; raison pour laquelle j’ai tout d’abord entrepris de travailler auprès de différentes banques d’investissement. J’ai ensuite intégré Bordier en 1997.

Avez-vous immédiatement commencé en tant qu’Associé ?

GB : J’ai été nommé Associé en 1998. Donc, très vite après mon arrivée au sein de la banque. On peut penser que les choses se sont faites très ou trop rapidement. Toutefois, ce que l’on aurait pu considérer comme trop rapide ou prématuré s’est finalement transformé en atout pour la banque. En effet, lorsque l’on se retrouve propulsé très vite ou très jeune à la tête d’un établissement, on bénéficie de fraîcheur et d’énergie. Ce qui est un avantage. Par ailleurs, j’emportais dans mes bagages une large expérience en matière d’investment banking, ce qui s’est avéré bénéfique pour l’entreprise. Il y a aussi eu un concours de circonstances avec le retrait rapide du cousin de mon père, Philippe Bordier. Celui-ci voulait prendre sa retraite et il fallait un membre de la famille pour le remplacer en tant qu’Associé. J’étais le seul prêt à reprendre le flambeau à ce moment-là. S’il n’y avait pas eu cette problématique successorale, j’aurais certainement été nommé Associé plus tard.

Devenir Associé, qu’est-ce que cela signifie pour vous ?

GB : Au fil du temps, je trouve que les choses ont beaucoup évolué en matière de succession dans les banques familiales. Aujourd’hui, « on ne naît plus Associé, on le devient ». J’en suis de plus en plus convaincu. Être porteur du nom aide, mais cela ne suffit pas (rires). Il faut aussi faire preuve de leadership et de compétences. Pour ma part, comme pour beaucoup de mes pairs, j’ai dû démontrer que j’avais des capacités. Il m’a fallu me montrer exemplaire, insuffler du dynamisme, partager ma vision. Et comme dans toute structure où le travail de chacun contribue à la bonne performance de l’ensemble, il faut aussi savoir maintenir un haut degré de motivation et d’engagement au sein des équipes. Cela passe évidemment par les résultats, mais aussi par la confiance que l’on inspire. Savoir où l’on va est particulièrement important dans notre cas. Surtout lorsque l’entreprise possède plusieurs Associés au gouvernail. Par exemple, si les équipes ne reconnaissent pas les compétences de leadership d’un Associé, elles chercheront machinalement à s’appuyer sur celui qu’elles considèrent comme compétent. Cela peut créer de l’insécurité et, à terme, des déséquilibres importants.

“Une personne venant de l’extérieur de la famille aura nécessairement une vision différente, qu’il s’agisse de sa manière de voir le monde, de penser l’environnement ou d’envisager la concurrence. Mais cette différence est une force.”

Comment avez-vous réussi à faire votre place en tant qu’Associé, notamment auprès des personnes ne faisant pas partie de la famille ?

GB : Dans mon cas, cela s’est fait en plusieurs étapes. J’ai aussi été énormément soutenu par les Associés en place. Dans un premier temps, ma force de travail a été un atout. Ma capacité de développement commercial et d’innovation également. Ces deux éléments étant quantifiables, les gens autour de moi en ont rapidement pris la mesure. Dans un second temps, j’ai réussi à convaincre en développant une vision de plus en plus transversale.

Je pense aussi qu’être capable de décider – et de décider rapidement – est une qualité fondamentale si l’on veut être soutenu et suivi. Un dirigeant qui ne décide pas perd vite du crédit auprès des siens.

Un autre élément d’importance est la capacité d’écoute. Trouver un juste équilibre au niveau relationnel avec les uns et les autres est également un exercice difficile, mais qui s’apprend avec le temps. Dans ce sens, avoir des Associés avec des styles différents est un atout, car cela permet de répondre à des affinités relationnelles différentes auprès des collaboratrices et collaborateurs.

L’entreprise familiale comme modèle

Certains de vos Associés ne font pas partie de la famille. Pensez-vous que le fait d’être membre de la famille ou non conduit implicitement à avoir une vue et des objectifs différents par rapport à l’évolution de l’entreprise ?

GB : Une personne venant de l’extérieur de la famille aura nécessairement une vision différente, qu’il s’agisse de sa manière de voir le monde, de penser l’environnement ou d’envisager la concurrence. Mais cette différence est une force. Elle donne clairement un avantage à la direction d’une entreprise familiale. L’apport extérieur, quel qu’il soit, ouvre les esprits, élargit les horizons et enrichit les points de vue. Et puis, dans une entreprise comme la nôtre, la culture familiale est forte et imprègne l’ensemble des collaboratrices et collaborateurs comme les Associés venant de l’extérieur. Des personnalités comme celle de Pierre Poncet, Associé de 1992 à 2012, ont beaucoup contribué au développement de l’entreprise. Ce dernier a d’ailleurs défendu les valeurs familiales avec la même énergie que nous-mêmes y mettons. La seule difficulté que je vois dans ce genre de cas est de réussir à faire coïncider impulsions extérieures et esprit de l’entreprise. Si la combinaison est réussie, les objectifs s’alignent d’eux-mêmes.

La notion de transmission est-elle aussi importante pour un Associé qui ne viendrait pas du sérail familial ?

GB : Pour répondre à cette question, je pense qu’il faut revenir à la base, c’està-dire au contrat d’association qui nous unit. Dans n’importe quelle société, plus les détenteurs économiques sont nombreux, plus le lien avec l’entreprise est dilué. Et la vision des Associés externes est plus facilement court-termiste. Chez nous, nous sommes peu nombreux et chaque Associé est en théorie propriétaire à 100% de la structure. D’où la nécessité d’envisager son action à long terme. Le soin mis dans la pérennisation des activités de l’entreprise entre dès lors directement dans la manière de la gérer puisqu’elle aura un impact direct sur son capital investi. Et la notion de transmission s’intègre logiquement dans ce processus. Il y a également une note plus émotionnelle qui, en termes de transmission, met tous les Associés sur un pied d’égalité : la fierté de voir l’entreprise prospérer après son passage. Dans ce cas, s’engager dans le seul but de maximiser son profit n’aurait aucun sens, car cela pourrait à terme fragiliser la structure. Bien que propriétaires de notre institution, nous n’en sommes que dépositaires. Il incombe aux Associés issus de la famille ou venant de l’extérieur de la transmettre à la génération suivante. Quelqu’un qui ne partagerait pas cette vision n’aurait pas grand-chose à faire à la direction de notre banque, qu’il s’agisse d’un membre de la famille ou non.

Où s’arrête la notion de famille dans le contexte de l’entreprise ?

GB : La notion de famille n’est pas définie précisément chez Bordier et j’en ai pour ma part une vision très large. Je considère comme faisant partie de la famille des cousins très lointains comme des membres plus directs. Qu’un ou une nouvelle Associée soit un membre distant ou proche ne pose aucun problème structurel, en tout cas pas au niveau de la direction. Quant aux clients et aux employés, il me semble qu’ils ont une position neutre sur le sujet. Tant que la famille est présente dans la structure, le contrat est rempli. Toutefois, il est capital qu’il y ait au moins un membre de la famille parmi les Associés. S’il ne devait y en avoir aucun, cela changerait la donne, car il serait difficile de continuer à se prévaloir du statut familial. Ce paramètre mis à part, qu’importe de savoir « à qui » l’entreprise peut ou doit être transmise. Le plus important est ce que l’individu peut apporter à l’entité. Aujourd’hui, ce sont d’abord les compétences et les capacités d’un individu qui peuvent faire toute la différence.

“Par ailleurs, anticiper le changement fait clairement partie de l’ADN des entreprises familiales. Cela sous-tend la vision à long terme, ainsi que la recherche de stabilité et de pérennité.”

Quels sont pour vous les limites et risques du modèle familial ?

GB : Le manque d’innovation ou l’attractivité moindre sont parfois évoqués. Il s’agit toutefois d’idées reçues qu’il faut combattre. Évoluant de manière plus lente, les entreprises familiales peuvent en effet être considérées comme moins attractives pour des personnes ayant l’esprit davantage attiré par des sociétés actives dans les nouvelles technologies, mais c’est faux. De récentes études sur le sujet prouvent le contraire. Et il existe des entreprises familiales particulièrement innovantes. Je pense notamment à Caran d’Ache, Victorinox, Firmenich, pour ne citer que certaines d’entre elles. Par ailleurs, anticiper le changement fait clairement partie de l’ADN des entreprises familiales. Cela sous-tend la vision à long terme, ainsi que la recherche de stabilité et de pérennité. Et si une entreprise familiale prend en principe moins de risques qu’une société avec un actionnariat public ou non familial, cela ne veut pas dire que ses décisions seront moins innovantes ou ses investissements moins opportuns. Cela signifie seulement que les risques sont tout simplement gérés de manière plus prudente. 

Et si cette prudence peut faire croire que les entreprises familiales sont moins réactives et moins spontanées, cette idée est largement contrebalancée par le fait qu’il est plus facile, dans ce type de structure, de prendre des décisions concertées et rapides. Et si l’on est moins concurrentiel dans certains domaines, qu’importe ! Notre vision à long terme limite les erreurs sur la durée, car on ne cherche pas à se réinventer constamment.

Comment contribuer à éviter les conflits – souvent perçus comme inévitables – entre membres de la famille dans le cadre de l’entreprise familiale ?

GB : Je peux difficilement parler pour les autres mais dans le cas de notre famille, deux principes doivent absolument être respectés pour maintenir un équilibre entre Associés porteurs du nom. Premièrement, c’est l’équité financière. Tout le monde doit être traité exactement de la même manière. Deuxièmement, c’est la définition des domaines de compétences. Pour éviter que les uns ne marchent sur les « plates-bandes » des autres. À partir de là, les relations interfamiliales sont forcément beaucoup plus harmonieuses. Et s’il devait y avoir une responsabilité partagée sur certains sujets, il y aurait toujours un tiers intégré à la discussion pour, le cas échéant, servir de médiateur et réinstaurer l’équilibre ou encore trancher si nécessaire.

La structure et la gouvernance de l’entreprise familiale

En juillet 2020, l’entité suisse a été restructurée, passant d’une société en commandite à une société en commandite par actions. Quels changements pour la gouvernance familiale ?

GB : Cette évolution n’a eu aucune incidence sur la gouvernance familiale. Notre objectif demeure identique : continuer à gérer notre entreprise en restant alignés sur les intérêts de nos clients. Notre structure s’est en revanche modernisée afin d’être mieux adaptée à l’environnement actuel; cette adaptation n’a toutefois rien changé par rapport à nos engagements. Notre contrat d’Associés n’a par ailleurs pas dû être modifié. La seule véritable évolution touche à la corporate governance qui a légèrement évolué, puisqu’il nous a fallu créer un organe de contrôle extérieur. Le contrat d’Associé est essentiel et a fait ses preuves, car il est crucial de formaliser les modalités d’entrée et de sortie des Associés, afin d’assurer la pérennité de l’entreprise. Au-delà de ces considérations, le contrat d’association permet évidemment de régler tous les points liés à la détention économique de chaque Associé et de ses rapports avec les autres dans ce contexte.

Avez-vous déjà pensé à établir une charte familiale ?

GB : Je comprends parfaitement son utilité pour certains types d’entreprises familiales, mais pour la nôtre, elle n’apporterait rien de plus que ce que nous avons déjà. Par ailleurs, le contrat d’Associés qui définit nos relations a une orientation très «business » alors qu’une charte familiale a une connotation plus psychologique. Je pense qu’il ne serait pas judicieux de mélanger les deux, car cela pourrait créer de la confusion dans les rapports entre Associés. Les choses sont suffisamment claires avec notre contrat.

Et qu’en est-il pour les Associés extérieurs à la famille ? Leur participation est-elle limitée afin de conserver le contrôle familial ou êtes-vous ouvert à une participation plus large ?

GB : À ce jour, les membres de la famille ont toujours détenu majoritairement le capital. Cela dit, il n’est pas exclu qu’un jour la proportion s’inverse, par exemple, s’il devait y avoir une association avec une autre famille, comme chez Pictet, où les familles Demole et de Saussure occupent depuis longtemps une place plus grande.

Succession et changement de génération dans une entreprise familiale

Un des enjeux majeurs d’une entreprise familiale est le passage du témoin : parlez-nous de votre expérience sur le sujet ?

GB : Lorsque j’ai succédé à Philippe Bordier – cousin de mon père – à la tête de la banque, la période de transition s’est faite rapidement et cela s’est avéré bénéfique. En effet, la succession peut être vécue comme une période de flottement par les employés et il est important de travailler à conserver un maximum de stabilité. Maintenir trop longuement deux générations avec les mêmes responsabilités crée de fortes tensions au sein des familles, il faut par conséquent éviter, autant que faire se peut, ce genre de situation. Ce passage du témoin doit aussi être vu comme une opportunité, un moment où l’on peut donner de nouvelles impulsions.

Lorsque vous pensez à votre propre succession, que souhaitez-vous transmettre à la génération suivante ? Des valeurs particulières, une marque, un savoir-faire ?

GB : Pour ma part, je souhaite tout d’abord transmettre un outil performant: une banque solide et parfaitement adaptée aux défis qui l’attendent. En tant qu’Associés, nous ne sommes pas uniquement propriétaires mais dépositaires d’un bien. Et nous devons le transmettre à la prochaine génération en bonne santé, mais en y considérant tous les éléments intangibles qui le constituent: valeurs familiales, esprit et ADN. Aux futurs Associés de porter ensuite la banque plus loin, en sachant évoluer avec leur temps pour la transmettre aux plus jeunes générations le moment venu.

“Aujourd’hui, nous sommes très loin de ce qui se faisait auparavant. On ne prépare plus nos successeurs, ils se préparent eux-mêmes. D’une part, en montrant leur envie de travailler et de rejoindre la structure et, d’autre part, en confirmant leurs capacités.”

Comment préparer la nouvelle génération à la reprise d’une entreprise familiale ?

GB : Aujourd’hui, nous sommes très loin de ce qui se faisait auparavant. On ne prépare plus nos successeurs, ils se préparent eux-mêmes. D’une part, en montrant leur envie de travailler et de rejoindre la structure et, d’autre part, en confirmant leurs capacités. Bien sûr, nous les suivons, nous les accompagnons et les conseillons, mais il est important qu’ils prennent leur destin en main, qu’ils cherchent à acquérir les compétences nécessaires pour convaincre les Associés en place du bien-fondé de leurs ambitions et atteindre les buts qu’ils se sont fixés. Il ne s’agit pas ici de préparer la nouvelle génération, mais bien de choisir les bons éléments. Et je suis persuadé qu’ils seront des managers d’autant plus efficaces qu’ils se formeront au préalable auprès d’institutions performantes, dans des domaines variés, complémentaires et innovants. Dans notre environnement actuel, développer ses compétences est fondamental. Parce que, globalement, les compétences des collaboratrices et collaborateurs ont augmenté de manière phénoménale. Un futur dirigeant doit donc pouvoir tenir la mesure. Même si être de la famille vous donne un delta positif, cela ne fait pas tout. Et ce ne sera pas suffisant si la nouvelle génération ne se montre pas à la hauteur du rôle qu’elle est appelée à jouer.

Comment réussir sa transmission ?

GB : Il existe tout d’abord plusieurs écueils contre lesquels il convient de se prémunir: niveau de préparation insuffisant chez les successeurs, absence de candidats crédibles pour prendre la relève, incapacité des nouveaux venus à apporter les innovations et la valeur ajoutée attendues. Considérons également le paramètre de l’expérience: une personne avec beaucoup d’expérience aura tendance à être moins flexible et opposera une résistance plus forte face à l’innovation. Il peut donc être bénéfique de faire entrer quelqu’un de plus jeune au sein de la direction familiale lorsque celle-ci comprend déjà des membres présents depuis de nombreuses années. Les derniers arrivés doivent cependant avoir la maturité nécessaire. Cela va de soi. Quoi qu’il en soit, s’il y a une règle à respecter en matière de gouvernance familiale, c’est bien celle de l’équilibre : équilibre des compétences, des expériences, mais aussi des âges. Trouver le bon profil et l’intégrer au bon moment permettra également de faire de sa succession une transmission réussie.

Lire également :

Les entreprises familiales constituent la forme d’organisation d’activité économique la plus …
L’interview de Caroline Scheufele, Coprésidente de Chopard.

Bordier en chiffres

  • 1844 fondation de Bordier & Cie, à Genève en Suisse, sous forme de société en commandite.
  • 5e génération de la famille Bordier actuellement à la tête de la banque.
  • 3 associés indéfiniment responsables : Grégoire Bordier, Evrard Bordier et Christian Skaanild.
  • #1 Le plus important Banquier Privé suisse.
  • 270 collaborateurs dans le Groupe, présents sur trois continents, dans six pays et onze villes à travers le monde.
This field is for validation purposes and should be left unchanged.

Comment pouvons-nous vous aider ?

Ensemble, nous construisons une relation sur-mesure.

Contactez-nous via email ou WhatsApp aujourd’hui.