La création dans le sang

Interview réalisée par Leila Vassiltchikov-Ali Khan

Interview réalisée par Leila Vassiltchikov-Ali Khan

Head of Legal & Tax
Attorney-at-law
Trust and Estate Practitioner (TEP)

Fondée à Sonvilier, dans le canton du Jura suisse en 1860, la Maison Chopard, dont la maison mère est située à Genève, est détenue et dirigée depuis 1963 par la 2e génération de la famille Scheufele. Le groupe, qui compte aujourd’hui 2’000 employés, est connu dans le monde entier pour ses créations horlogères et de joaillerie.

Chopard, une entreprise familiale

Chopard est une société familiale depuis 1860. Votre famille en a fait l’acquisition en 1963. Les Scheufele étaient ils déjà dans le domaine de l’horlogerie et de la bijouterie avant l’acquisition de Chopard ?

Caroline Scheufele (CS) : Tout à fait. Nous sommes originaires de la ville de Pforzheim, en Allemagne, dans la ForêtNoire. Cette dernière est connue pour son activité d’orfèvrerie depuis le XVIIIe siècle et était surnommée Die goldene Stadt, soit la «Ville dorée». Le margrave de Bade avait favorisé ce développement. Mon arrière-grand-père était déjà dans le métier et avait fondé la société Eszeha, dont le nom faisait référence à la sonorité allemande des trois premières lettres de notre nom de famille: «S C H». Celle-ci produisait déjà des montres. Eszeha est passée entre les mains de trois générations de notre famille. Dans les années 1980, elle a été intégrée à Chopard. Mon frère et moi constituons la quatrième génération dans le métier.

Pensez-vous que Chopard soit perçue de l’extérieur comme une entreprise «familiale» ?

CS : Nos partenaires de l’étranger, particulièrement ceux de nos boutiques franchisées ou des magasins multimarques avec lesquels nous travaillons, le savent. Au Moyen-Orient, je peux même dire que nous travaillons ensemble de génération en génération. Il y a en effet encore beaucoup d’agents dans la région qui détiennent nos boutiques de père en fils et il n’est pas rare que mon père ait déjà été en relation d’affaires avec les parents des personnes avec lesquelles mon frère et moi collaborons aujourd’hui. Du côté des clients, nos habitués comme notre clientèle VIP, celle qui fait l’acquisition de pièces plus importantes, ont tout à fait conscience du caractère familial de la maison.

À votre avis, quelles sont les caractéristiques d’une société familiale ?

CS : Je dirais avant tout que nos employés sont fiers de travailler pour une famille, plutôt que pour une multinationale dans laquelle les directeurs changent généralement tous les deux ou trois ans et où les employés sont souvent considérés comme des numéros. Ils sont heureux de trouver chez nous un management stable et facilement accessible. Nous pratiquons une politique des « portes ouvertes ». N’importe quel collaborateur peut venir nous voir lorsqu’il le souhaite pour une question, partager une idée ou un problème. Je pense que c’est ce qui explique que certains collaborateurs restent facilement vingt-cinq ou trente ans dans l’entreprise. Certains ont même fait leur apprentissage chez nous et sont restés jusqu’à la retraite.

Cela dit, il est certain que travailler pour une famille n’est pas toujours évident, car celle-ci comporte plusieurs membres, avec des caractères différents. Je reste néanmoins convaincue que cela a un impact positif sur l’entreprise. Je vous donne un exemple. Nous avons une boutique à Gstaad. Une station où j’ai moi-même un chalet et où mes parents passent beaucoup de temps. L’esprit de cette boutique, inspirée de la montagne, est très différent des autres. Or, nos deux vendeurs partent à la retraite. Nous devons donc les remplacer. À mes yeux, il était primordial que mes parents participent à ce recrutement: je tenais à ce que le choix final leur convienne. Le candidat que nous avons reçu s’est donc retrouvé face à trois membres de la famille Scheufele qui l’observaient au cours de l’entretien. Il a dû prendre peur (rires) ! C’est le genre de situation qui n’arriverait jamais à Londres ou à New York où j’ai pour habitude de faire les engagements avec mon frère. Gstaad est un cas spécial et illustre de manière typique le côté familial de l’entreprise.

“Nos forces, ce sont les valeurs que nous portons, le fait de pouvoir travailler en famille et, surtout, notre capacité de réaction. C’est un réel atout. Chez nous, les décisions se prennent très vite.”

Quelles sont, selon vous, les forces et les faiblesses de ce modèle d’entreprise ?

CS : Nos forces, ce sont les valeurs que nous portons, le fait de pouvoir travailler en famille et, surtout, notre capacité de réaction. C’est un réel atout. Chez nous, les décisions se prennent très vite. Mon frère, mes parents et moi-même vivons très proches les uns des autres. Il peut donc arriver qu’une décision importante pour l’entreprise se prenne un dimanche matin entre deux portes. Je pense notamment à la pandémie: on s’est très vite adaptés aux mesures covid.

Travailler en famille peut aussi être compliqué dans certains cas, car nous avons tous nos personnalités, certaines plus fortes que d’autres. Mais, dans l’ensemble, cela amène plus de positif. Nous pouvons également rencontrer des difficultés, en tant que société indépendante, pour l’accès à certaines opportunités. Si nous avons besoin d’un emplacement dans un lieu stratégique pour une boutique, il faut parfois se battre davantage, car nous représentons une seule marque et non un grand groupe comme Richemont ou LVMH.

Quelles sont les valeurs que votre famille a voulu voir portées ou même incarnées par l’entreprise ?

CS : Il y a d’abord le travail. Les armoiries de la famille Scheufele sont deux pelles entrecroisées, « Schaufel » en allemand. Notre nom est dérivé de là. Ensuite, la transmission et la valorisation de nos métiers nous tiennent à cœur. Dans l’horlogerie ou dans la joaillerie, il y a de nombreux savoir-faire différents et il nous paraît fondamental de les rendre accessibles à de jeunes artisans. Notre industrie est assez hermétique et, par conséquent, ses métiers sont mal connus de la population. C’est à nous de promouvoir la beauté de cet artisanat auprès de la jeune génération.

Le développement durable est très important pour nous. En 2013, alors que nos concurrents ne portaient encore aucune valeur à ce sujet, nous avons été les premiers à défendre l’idée de la transparence dans l’industrie du luxe, avec notre concept autour de l’or éthique. L’idée était de garantir que les mines d’où provient l’or utilisé chez Chopard correspondent à certains critères. Ainsi, le mercure employé lors du processus d’extraction, un élément hautement toxique, ne doit pas être déversé dans les rivières. Nous garantissons également que les mineurs reçoivent des salaires fixes leur permettant d’envoyer leurs enfants à l’école, et ce, même s’ils ne trouvent pas d’or. Nous avions commencé avec une mine ; aujourd’hui, il y en a beaucoup d’autres qui remplissent les standards de commerce responsable que nous avons fixés.

Nous nous sommes également engagés dans le développement durable avec les pierres précieuses, surtout les pierres de couleur, mais le chemin est encore long. Les mines se trouvent souvent dans des pays peu transparents. Les pierres sont parfois extraites et utilisées pour financer des activités illégales. Il est difficile de changer les mentalités ! Mais c’est là que tous les acteurs de l’industrie du luxe doivent travailler main dans la main. L’union fera la force pour régler ce problème.

“Le développement durable est très important pour nous. En 2013, alors que nos concurrents ne portaient encore aucune valeur à ce sujet, nous avons été les premiers à défendre l’idée de la transparence dans l’industrie du luxe, avec notre concept autour de l’or éthique.”

L'entrée dans l'entreprise familiale

Aviez-vous travaillé pour une autre maison joaillière avant d’entamer votre carrière au sein de la société familiale ?

CS : Pas du tout. J’ai suivi une formation au Gemological Institute of America (GIA), j’ai aussi fait un bref passage dans une école de beaux-arts. Même si j’en ai profité pour apprendre l’espagnol et l’italien, je me suis assez vite rendu compte que je n’étais pas faite pour les études universitaires. Mon père m’a alors proposé de travailler dans notre entreprise en Allemagne. J’y ai donc fait mes premières armes, passant par tous les départements : l’emballage, l’export, le service après-vente, etc. En contrepartie, je pouvais passer chaque semaine deux jours dans le département de création, parce que c’est ce que je voulais faire. Un an après, je suis revenue à Genève.

Lorsque vous êtes arrivée en Suisse, quelle vision stratégique avez-vous eue pour Chopard et en quoi votre apport a-t-il marqué le développement de votre entreprise ?

CS : De retour à Genève, j’ai tout de suite partagé un bureau avec mon frère. Entre lui et moi, il y a une bonne synergie, un peu comme le yin et le yang. J’ai tout de suite commencé à avoir des dossiers à gérer et je me suis assez vite intéressée à ce qui se passait dans le département de création. J’ai aussi commencé à apporter ma vision stratégique pour la marque. L’une de mes premières idées à avoir eu un impact dans le développement de Chopard soulignait la nécessité d’ouvrir des boutiques en nom propre. À l’époque, nous n’en avions aucune: tous nos produits étaient vendus par des enseignes multimarques comme Bucherer, par exemple. Or, il me semblait essentiel de vendre nous-mêmes nos produits pour mieux nous faire connaître. À force d’insister, une première boutique franchisée a été inaugurée à Hong Kong, puis une première boutique entièrement gérée par notre maison s’ouvrait à Vienne. Celle de Genève a suivi. Quelques années plus tard, mon père a reconnu que j’avais eu la bonne vision stratégique pour Chopard, elle nous permettait d’être proches de la clientèle finale. Aujourd’hui, nous avons 13 filiales, 60 boutiques en nom propre et environ 90 boutiques franchisées dans le monde.

Un exemple de valeur ajoutée que vous avez apportée à l’activité de Chopard ?

L’original Happy Clown conçu par Caroline Scheufele, fait de diamants flottants.

CS : J’ai toujours souhaité créer, dessiner… J’ai d’ailleurs imaginé mon premier bijou à l’âge de 16 ans : le clown Happy Diamonds. À l’époque, il n’y avait pas encore de joaillerie chez Chopard, on ne produisait que des montres. J’ai toujours adoré aller au cirque et voir les clowns, car même s’ils ont l’air un peu tristes, ils font rire tout le monde. J’ai imaginé un pendentif clown avec des diamants qui dansaient dans son ventre transparent. Mon père en avait fait produire un et me l’avait offert pour Noël. Un jour, en visitant les ateliers, j’ai pourtant découvert plusieurs clowns de tailles différentes. J’étais étonnée, car je pensais avoir une pièce unique. Mon père m’a alors expliqué qu’il en avait fait faire une petite série pour des raisons commerciales et que je comprendrais plus tard… En réalité, c’est notre activité de joaillerie qui débutait !

Votre arrivée à Genève était-elle perçue comme naturelle et légitime vis-à-vis des collaborateurs externes à la famille ?

CS : Ce n’était pas naturel pour tout le monde. J’ai dû jouer des coudes et montrer ce que j’avais à apporter. Une personne avait même dit que si je venais, elle partirait. Je n’avais pourtant rien fait pour susciter une telle réaction. La situation était très différente lorsque mon frère est arrivé. Il n’y a pas eu ce genre de réactions.

Comment vous y êtes-vous prise pour convaincre ?

CS : En apportant ma vision stratégique et ma créativité. En faisant également preuve de débrouillardise. Un jour, j’ai dû représenter notre maison à Manille pour une exposition. Mon père m’a alors donné le titre officiel de vice-pré- sidente, car j’allais aussi y rencontrer des personnes du monde politique et il était important que celles-ci identifient bien ma position dans l’entreprise. Lorsque je suis sortie de l’avion, j’étais en jeans et en t-shirt, et coiffée de nattes. La délégation qui m’attendait sur le tarmac cherchait la vice-présidente des yeux. Vu mon jeune âge, personne ne pouvait imaginer que je puisse être cette femme. Pour eux, je n’étais qu’une « enfant» (rires). J’ai aussi dû prononcer un discours pour l’ouver- ture de la boutique. J’ai appelé mon père, complètement paniquée, et il m’a dit « débrouille-toi » (rires). J’ai rédigé mon discours pendant toute la nuit, un cauchemar, mais tout s’est finalement bien passé.

L’entreprise « familiale » comme modèle d’entreprise

Où s’arrête la notion de « famille » dans un tel contexte ?

CS : Chez nous, les choses sont assez simples, contrairement à d’autres entreprises comme Hermès ou Swarovski, qui sont détenues par plusieurs membres d’une même famille. À l’exception de mes parents, il n’y a que mon frère et son épouse qui travaillent dans l’entre- prise. Karl-Friedrich a aussi trois enfants, mais ils n’ont pas encore fait leurs choix professionnels. Notre noyau familial reste donc restreint.

Quelles qualités les membres de la famille doivent-ils développer individuellement et collectivement pour contribuer au développement de ce modèle ?

CS : Il faut comprendre le fonctionnement de l’entreprise et de ses départe- ments comme j’ai dû le faire moi-même. Ensuite, la créativité n’est pas quelque chose qu’on peut apprendre : on l’a ou on ne l’a pas. En revanche, l’administration, les finances ou le marketing sont des domaines importants sur lesquels il faut avoir une certaine maîtrise. Le marketing et la communication, notamment digitale, ont pris beaucoup de place ces dernières années. Le covid a encore accéléré les choses avec la digitalisation de notre industrie et le développement de l’e-commerce. Tous ces aspects technologiques sont devenus incontournables. La jeune génération doit sans nul doute développer cette compétence-là. Moi, je n’ai jamais voulu avoir un ordinateur à la maison, mais, aujourd’hui, je n’ai malheureusement plus le choix. Quoi qu’il en soit, ils devront apporter leur pierre à l’édifice et il ne suffira pas d’être un membre de la famille Scheufele. Cela ne serait pas juste pour Chopard.

Comment contribuer à éviter les conflits (souvent perçus comme inévitables) entre membres de la famille en relation avec une entreprise familiale ?

CS : Par la communication. Chez nous, c’est la majorité qui décide. Celui qui a une idée doit faire valoir de bons arguments et savoir convaincre.

La structure et la gouvernance de l’entreprise familiale

Vous-même ainsi que votre frère et vos parents avez tous un rôle à jouer dans l’entreprise. Comment vos rôles sont-ils répartis ?

CS : Les chiffres, c’est l’affaire de mon père ! Mais il partage parfois des idées de création. Ma mère se concentre sur l’administration. Mon frère s’occupe de tout ce qui touche à l’horlogerie masculine. Quant à moi, je me consacre à tout ce qui est lié à l’univers féminin, même si je mets parfois mon grain de sel dans la collection hommes (rires). Je me charge aussi des boutiques et du retail. Au niveau marketing, mon frère supervise notre partenariat avec la course automobile Mille Miglia en Italie ; moi, c’est plutôt le Festival de Cannes. Mais, comme nous partageons le même bureau depuis toujours, la communication se fait instantanément et chacun sait tout ce qui se passe. D’ailleurs, les grandes décisions, notamment pour les nouvelles campagnes de communication, nous les prenons toujours ensemble.

“En tant que société familiale, nous sommes attachés à la continuité et avons un sens aigu de la responsabilité. Notre soutien aux causes philanthropiques ou liées au développement durable s’ inscrit dans cette logique.”

Est-il, selon vous, utile ou opportun de structurer aussi la relation entre les membres de la famille à l’aide, par exemple, d’une charte de famille ou d’un contrat d’actionnaire couvrant les éléments essentiels de ce que les membres de la famille veulent et doivent faire en relation avec l’entreprise ?

CS : Nos parents nous ont déjà transmis leurs parts dans l’entreprise. Même s’ils sont encore présents et font encore figure d’éminences grises, nous pouvons dire que, de leur côté, les choses sont réglées. S’agissant de mon frère et de moi-même, nous n’avons pas ressenti le besoin de formaliser les choses davantage. Nous devrons cependant nous pencher sur la question à un moment ou à un autre, surtout lorsqu’il s’agira de réfléchir à la transmission. Nous avons en revanche pris le temps de faire une charte familiale dans laquelle nous avons mis en évidence nos valeurs. C’est un exercice utile. Mais je ne pense pas qu’il faille en faire trop à ce sujet.

Le concept de planification patrimoniale vous paraît-il intéressant dans ce contexte ?

CS : Certainement. Je l’ai dit, nous devrons à un moment donné penser plus précisément à la planification de la transmission de l’entreprise. Mais, dans notre cas, c’est encore un peu tôt pour le faire, car nous ne sommes pas encore certains de la volonté de la prochaine génération à s’engager dans l’entreprise.

Dans ce contexte, voyez-vous une utilité à faire intervenir des personnes extérieures à la famille et, si oui, dans quels rôles ?

CS : Dans un premier temps, nous voudrons autant que possible arriver à des solutions en famille. Par la suite, nous devrons sûrement nous tourner vers un professionnel pour les aspects plus juridiques. Cela dit, je ne serais pas opposée à faire appel à un arbitrage extérieur si cela devait être nécessaire.

La philanthropie dans le cadre de la gouvernance familiale

Selon vous, quelle est l’importance pour une entreprise familiale de s’engager dans des causes d’intérêt public ?

CS : En tant que société familiale, nous sommes attachés à la continuité et avons un sens aigu de la responsabilité. Notre soutien aux causes philanthropiques ou liées au développement durable s’inscrit dans cette logique.

Le soutien philanthropique fait-il partie de votre héritage familial ou est-ce plutôt le fruit d’une adaptation liée à votre propre expérience de vie ?

CS : Dans notre cas, c’est un héritage familial et cela tient à cœur de toute la famille. Mon père est très impliqué dans la fondation de José Carreras pour la recherche contre la leucémie. Mon frère, quant à lui, s’investit beaucoup dans des projets pour la protection de la nature et notamment des Alpes. De mon côté, je soutiens la Elton John Aids Founda- tion. Mais, ce qui me porte le plus, c’est tout ce qui touche au développement durable en lien avec les matériaux que nous utilisons. C’est moi qui ai lancé ce projet, baptisé The Journey, et souligné son importance, mais nous ne faisons pas tout cela pour l’image. Il y a d’ail- leurs beaucoup de causes que nous soutenons sans en parler. Comme on le dit en anglais, « we don’t do it to shine». Il est simple de signer un chèque. Nous, en plus, nous y mettons notre cœur et notre énergie.

Sur la base de quels critères choisissez-vous vos engagements caritatifs ?

CS : Le lien personnel et amical que nous entretenons avec les fondateurs de ces organisations est fondamental. C’était le cas pour mon père avec José Carreras et c’est pareil pour moi avec Natalia Vodia- nova et Petra Nemcova. Elton John est également un ami de longue date. Ce n’est donc jamais impersonnel. Le fait de connaître les gens est important, car nous savons ce qu’ils font de l’argent et sommes certains que notre soutien servira les causes défendues.

Vous dédiez certaines de vos collections comme celle de « Happy Hearts » à un ou des projets philanthropiques. Est-ce une manière de vous engager davantage que de simplement faire don à une fondation de bienfaisance ?

CS : Tout à fait. Dans notre collection Happy Hearts, nous consacrons trois gammes à ces causes sur le long terme. Les cœurs roses sont dédiés à la Naked Hearts Foundation de Natalia Vodianova qui soutient les enfants autistes, nombreux en Russie. Les cœurs rouges, eux, sont vendus au profit de la fondation de notre ambassadrice Petra Nemcova, All Hands and Hearts, qui construit des écoles dans les endroits touchés par des catastrophes naturelles. Elle était présente en Thaïlande lors du tsunami en 2004 et y a perdu l’homme qu’elle allait épouser. Elle a alors décidé de faire quelque chose pour aider les victimes de ces catastrophes naturelles. Elle a alors décidé de faire quelque chose pour aider les victimes de ces catastrophes naturelles. Elle a déjà contribué à faire construire 160 écoles autour du monde. Enfin, nous soutenons aussi le programme Education Above All lancé par S.A. la Sheikha Moza bint Nasser du Qatar, qui a déjà aidé plus de 10 millions d’enfants à se scolariser. D’ailleurs, je travaille actuellement sur un nouveau dessin pour soutenir ses œuvres.

Succession et transfert intergénérationnel dans une entreprise familiale

Un des enjeux des entreprises familiales semble être celui du passage des générations : quels sont votre point de vue et votre expérience sur le sujet ?

CS : Mon grand-père avait cantonné mon père à son établi d’orfèvrerie et d’horlogerie. Il n’avait pas une vision large du fonctionnement de l’entreprise. Malheureusement, il est décédé jeune et mon père a dû rapidement apprendre à gérer la société de A à Z. Le père de ma mère, qui était aussi du métier, l’a beaucoup aidé à ce moment-là. Mon père avait tiré les leçons de cette expérience et voulait absolument que mon frère et moi-même soyons aussi impliqués que possible et que nous fassions nos propres expériences. J’ai donc été mise dans le bain très vite.

“Il est important de donner l’envie aux générations futures de participer et d’intégrer l’entreprise, mais c’est aussi à eux de montrer leur intérêt et leur volonté de s’y engager.”

Comment préparer au mieux les générations futures à la reprise d’une entreprise familiale ?

CS : Il est important de leur donner l’envie de participer et d’intégrer l’entreprise, mais c’est aussi à eux de montrer leur intérêt et leur volonté de s’y engager. Tant mes parents que mon frère et moi avons mis toute notre âme et beaucoup d’émotion dans notre travail. C’est essentiel pour que cela fonctionne. Il faut aussi être capable de faire des sacrifices pour l’entreprise et ce n’est pas donné à tout le monde. Pour ceux de la génération suivante qui souhaiteraient s’engager dans l’entreprise, nous devrons, à mon avis, leur confier des projets ponctuels, mais surtout, et comme cela a été le cas pour moi, les envoyer passer suffisamment de temps dans notre entreprise sœur en Allemagne, à Pforzheim. C’est un petit village d’orfèvres où il y a peu de distractions et les gens y travaillent avec une extrême rigueur. Ce fut une excellente école en ce qui me concerne. La personne qui supervisait ma formation voulait que je devienne meilleure que les autres collaborateurs et a mis la barre très haut. J’ai dû travailler deux fois plus que mes collègues, justement parce que j’étais la fille du patron et qu’il fallait que je fasse mes preuves.

Quels sont les éléments qui devraient, selon vous, conduire les responsables d’une entreprise familiale à conclure qu’il est temps de changer de modèle ou même de céder l’entreprise ?

CS : Dans notre cas, le moment n’est pas encore venu. La prochaine génération doit d’abord se déterminer sur son choix professionnel, puis gagner une solide expérience. Pour le moment, les enfants de mon frère sont encore en études. Mon neveu est étudiant à l’École hôtelière de Lausanne, mais il est déjà impliqué dans l’une de nos activités annexes en lien avec le commerce du vin.

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Chopard en chiffres

  • 1860 création du premier atelier par Louis Ulysse Chopard, dans le canton du Jura, en Suisse.
  • 1963 Paul-André Chopard, petit-fils du fondateur, cède la manufacture à Karl Scheufele III, dont la maison mère est située à Genève.
  • 5 générations à la tête de Chopard depuis sa fondation (trois générations de la famille Chopard, deux générations de la famille Scheufele).
  • 4 générations de la famille Scheufele actives dans le domaine de l’horlogerie et de la bijouterie.
  • 2 coprésidents, Caroline et son frère Karl-Friedrich Scheufele sont les actuels dirigeants de Chopard.
  • 40 métiers sont regroupés sur trois sites de production.
  • 2’000 collaborateurs.
  • 1’200 points de vente et plus de 150 boutiques dédiées à travers le monde.
  • 100% d’or éthique est utilisé par Chopard depuis 2018 dans sa chaîne de production pour la fabrication de ses montres et bijoux.
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